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Pour éviter un vote illégal, l'Etat doit proposer un plan B

Selon le professeur d'Université Pascal Mahon, le fait de lier la réalisation du RER à l'équilibre budgétaire pourrait violer la Constitution.

20 juin 2012, 11:10
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"Je regrette que le Conseil d'Etat ait travaillé dans la précipitation sur un projet aussi important que le Transrun. Ça me choque! La question de la légalité du décret sur le RER avait été soulevée par la commission législative: mais le Conseil d'Etat a asséné ses grandes certitudes, sûr de son coup!"

Philippe Bauer, député PLR et avocat de métier, avait tenté de mettre en garde le Grand Conseil le 22 mai lors du vote sur le RER neuchâtelois et son fameux Transrun: selon lui, le fait de lier la réalisation du nouveau réseau à l'obligation d'économiser violait clairement la Constitution fédérale et son principe d'unité de matière. Les arguments du député n'avaient pas été entendus.

Pourtant aujourd'hui, Pascal Mahon, professeur de droit constitutionnel à l'Université de Neuchâtel, confirme qu'il existe un problème de légalité: mandaté par le Conseil d'Etat à la suite de doutes sur ce point, il estime que le décret "RER et équilibre budgétaire", sur lequel les Neuchâtelois devront voter le 23 septembre, comporte "un doute, sérieux, quant au respect de l'unité de matière" . Cette dernière interdit qu'une proposition soumise au vote soit constituée de "deux ou plusieurs éléments sans lien étroit, réel et objectif entre eux" , et dont la réunion place le citoyen face à un dilemme.

 

Réduire le risque

Selon Pascal Mahon, "il y a un lien réel et objectif entre la réalisation du RER et son financement" . Par contre, le professeur admet que la votation porterait sur deux questions différentes: d'un côté la construction du RER, de l'autre l'instauration du principe d'équilibre budgétaire en général. "Or il est notoire qu'il existe une partie de la population qui est favorable à l'une des mesures, mais pas à l'autre, et vice versa."

Pascal Mahon en conclut donc que "divers indices sont susceptibles de mettre sérieusement en doute la constitutionnalité" du décret sur le RER.

Dans son mandat, il avait également pour mission de faire des propositions au Conseil d'Etat pour réduire ou supprimer tout risque d'anticonstitutionnalité.

Le Conseil d'Etat a choisi son plan B pour éviter que l'épisode peu glorieux de 2011, lorsque le TF avait annulé la votation cantonale sur la fiscalité des entreprises et l'accueil de l'enfance, ne se reproduise: il propose donc que l'exigence de l'équilibre budgétaire soit limitée à la durée du remboursement de l'emprunt en faveur du RER, soit 25 ans.

Le lien entre les deux objets paraît ainsi plus évident. Et, selon Pascal Mahon, "il réduit sensiblement le risque quant à l'unité de matière" . Sans pour autant exclure totalement qu'en cas de recours, un tel vote soit cassé par le Tribunal fédéral.

 

L'UDC exploitera la faille?

Le Grand Conseil se prononcera sur ce nouveau décret, en deuxième lecture, les 26 et 27 juin. "Ça risque d'être chaud" , assure Walter Willener, député UDC et, comme la majorité de son groupe, opposé au RER neuchâtelois. "Le risque de violer l'unité de matière n'est pas exclu avec cette variante. On n'est sûr de rien! Il se trouvera bien un honnête citoyen dans ce canton pour recourir contre un tel vote."

L' "honnête citoyen" aura-t-il les couleurs de l'UDC? Le député Raymond Clottu glisse qu'il est possible que l'UDC exploite cette faille si le projet de RER était accepté. Et l'avocat Philippe Bauer? "Il faut que j'analyse les choses. Mais je reconnais qu'avec la variante proposée, le manque d'unité de matière n'est plus aussi choquant qu'avant."

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