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L'horlogerie est-elle confrontée à une crise durable?

Dans la cadre du premier "face à face", lié au lancement de la nouvelle formule de la page Forum de votre journal, nous avons demandé à Xavier Comtesse et Jean-Daniel Pasche de donner leur avis sur la crise horlogère. Réagissez également à ce débat en publiant votre commentaire sous l'article.

07 déc. 2016, 10:29
Dans l'horlogerie et les médias, les salaires seront gelés en 2017.

 

Xavier Comtesse

Xavier Comtesse (oui)

Manufacture Thinking

Dans dix ans, vingt ans... l’horlogerie suisse aura peut-être disparu. Pour deux raisons principales: d’abord la montre servira demain essentiellement à capter des données et très accessoirement à donner l’heure. Ensuite, parce que l’on quitte un monde de l’accumulation de biens (société de consommation) pour favoriser les expériences de toutes sortes (société du spectacle). 

L’enjeu économique et social du «temps» s’est déplacé vers les «données». Big Data plutôt que Big Ben, semblent murmurer les gens. Il est clair que la position privilégiée de la montre sur le poignet crée de la compétition, car c’est de là que demain on pourra mesurer les battements du cœur, la pression sanguine, etc. C’est le lieu le plus stratégique pour «monitorer» la santé. Attention, on va pouvoir faire encore plus! La montre sera notre portefeuille, notre carte d’identité, elle détiendra tous nos mots de passe, etc. Bref une machine à «Big Data».

Ensuite, la montre suisse a été un marqueur sociétal important comme l’expression ultime de la société de l’avoir (accumulation de biens matériels). Elle va cependant céder la place à l’expérience-client (accumulation de biens immatériels). Il faut bien le reconnaître la montre n’offre guère d’expérience-client au contraire de la «smartwatch» pleine de «data» à maîtriser comme par exemple celles liées aux activités sportives. Ne l’oublions pas! Lorsqu’une industrie se rétrécit en perdant des parts de marché... elle a tendance à disparaître... Suchard, Kodak, Märklin, BlackBerry sont devenus des cas d’école. En économie marchande, lorsque 20 à 25% d’un marché est pris par un nouveau produit, alors les anciens s’éclipsent… à leur tour.

Le destin de l’horlogerie suisse se décide donc aujourd’hui. Soit on assiste à une forte réaction du monde horloger vers les «data» (le temps n’étant au final qu’une catégorie de données structurées), soit «bye bye» la Suisse horlogère!


Jean-Daniel Pasche

Jean-Daniel Pasche (non)

Président de la Fédération de l'industrie horlogère suisse

Nous sommes quand même toujours à la merci de la force du franc. Nous avons aussi des décisions politiques en Chine par rapport au luxe ostentatoire qui nous pénalisent. Ça crée une incertitude.

La baisse du tourisme à Hong Kong nous affecte aussi, tout comme en France à cause du terrorisme. Les gens voyagent. L’horlogerie dépend beaucoup du tourisme. Les gens ont du temps quand ils voyagent. Quand il y a de mauvaises nouvelles, ce n’est pas bon. L’horlogerie n’est pas un produit qu’on achète sans prendre son temps.

De plus, qu’est-ce que ça veut dire durable?Je ne sais pas. Nous avons eu une baisse en 2015. Et, de fait, l’année 2016 enregistre aussi une baisse sensible. Pour l’année prochaine, nous espérons à avoir les chiffres de cette année. Ça voudrait dire que nous sommes dans le creux du «u», si je puis m’exprimer ainsi. Je suis confiant sur le moyen long terme. Il existe des potentiels de développements pour l’horlogerie suisse. Nous entendons dire qu’il y a de nouveau des signes positifs en Chine. Je ne suis pas pessimiste pour l’avenir de l’horlogerie suisse. Tout en reconnaissant la situation actuelle.

En discutant avec mes collègues du Japon et de Chine, je constate qu’ils sont aussi touchés. Dans certains secteurs, quand on parle des montres connectées, l’horlogerie chinoise, de par ses prix d’entrée de gamme, est plus une victime que nous. La crise est un phénomène général actuellement. Évidemment les situations sont différentes. Les atteintes sont là. Les raisons ne sont pas pour toutes les mêmes.
En Suisse, nous avons les moyens de rebondir avec la formation les infrastructures, l’innovation. C’est pour ça que je suis optimiste mais réaliste.

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